Difficile de présenter Karim Sefiat en quelques mots… En effet, ce professionnel gravite depuis le début de sa carrière dans l’écosystème de la formation.
Bref, Karim est LA personne de référence sur le sujet de l’audit de renouvellement.
Quels sont les enjeux de l’audit de renouvellement ? Comment se déroule-t-il ? Quelle est la posture à adopter ? Quelles sont les non-conformités les plus fréquentes relevées pendant cet audit ?
En empruntant sa casquette d’auditeur Expert de l’organisme certificateur ISQ Certification, Karim nous livre un éclairage en toute transparence sur l’audit de renouvellement.
L’objectif de cet entretien exclusif ? Vous permettre d’arriver le plus sereinement possible à l’audit de renouvellement avec l’envie profonde de prouver la qualité de vos processus qualité.
On vous laisse découvrir ses réponses à nos questions !
« L’audit de renouvellement est réalisé au bout 3 ans, un audit prenant en compte l’audit initial (au départ, Qualiopi est nouveau pour les organismes de formation et pour les auditeurs, ce qui amenait à des audits “très” bienveillants) et l'audit de surveillance entre le 14ᵉ et 22ᵉ mois (qui permet d’asseoir ce qui avait été démontré, de prouver l’amélioration continue et, s’il y avait des non-conformités, de vérifier que les plans d’actions ont bien été mis en œuvre).
Au bout de trois ans, Qualiopi devrait faire partie intégrante du système organisationnel des organismes de formation. Ce que je dis souvent, c'est que Qualiopi est, au-delà d'être une obligation réglementaire et légale pour pouvoir bénéficier des fonds publics, un outil de pilotage, un outil de management, un outil de structuration de votre système. Pourquoi ? Parce que Qualiopi est architecturé autour de sept critères qui devraient être “processés”, la marque QUALIOPI est bien “processus certifié”. On a tendance à oublier qu’on ne fait pas, lors de l'audit de renouvellement, une vérification documentaire. L'auditeur n'est pas un contrôleur documentaire. L'auditeur vient vérifier que les processus qui ont été présentés à l'audit initial, consolidés à l'audit de surveillance, ont pris de la maturité et sont en conformité avec le référentiel.”
“L'approche est très clairement définie dans le préambule du guide de lecture. On a maintenant une identification des attendus liés à la conduite de l'audit :
Le prestataire doit démontrer les processus qu'il a mis en œuvre à travers des éléments de preuve. L'auditeur doit apprécier les preuves qui sont fournies et constater la conformité ou la non-conformité.”
“Nous avons été impactés par deux arrêtés coup sur coup, qui ont amené le passage rapide d’une version 7 à une version 9. Cela induit pour les organismes de formation une agilité, une adaptabilité parce que la V8 a impacté de manière assez importante les organismes de formation. En effet, il y a eu beaucoup d'ajouts d'obligations spécifiques liées à la certification, aux personnes en situation de handicap et à l'alternance, avec beaucoup de modifications des niveaux attendus. Enfin, il y a un dernier décret qui est arrivé le 28 décembre 2023 pour donner un cadre concernant la sous-traitance et le CPF. Pourquoi j'insiste là-dessus ? Ça sous-entend aussi une nouvelle agilité, une nouvelle adaptabilité des auditeurs qui doivent s'imprégner, eux aussi, de la compréhension, de la lecture et de la nouvelle sémantique du guide de lecture.”
“Le critère 1, qui a été très impacté par la V9, se retrouve souvent avec des non-conformités. En effet, il y a eu des modifications en termes de définition dans le glossaire. Par moment, le prestataire ne répond pas à certains items attendus. Dans l'indicateur 3, par exemple, il y a des nouveautés liées aux actions de formation certifiantes avec des taux d'insertion attendus. Dans ce cas, la nouveauté vient de la “Nota bene”. On se retrouve souvent avec des non-conformités mineures parce que les taux d'insertion globaux dans l'emploi et le taux d'insertion métier visé ne sont pas calculés ou ne sont pas donnés. Donc concernant les non-conformités mineures, on est sur le critère 1 avec les indicateurs de diffusion, le critère 3 avec l’indicateur 13 et enfin l’indicateur 30.”
“Généralement, les non-conformités majeures sont essentiellement sur le critère 2, qui est lié à la conception pédagogique, et le critère 3, qui est lié à la réalisation de l'action de formation.
Plus précisément sur les non-conformités majeures, on retrouve beaucoup de problématiques sur :
Ça, c'est sur le volet catégorie d'action en général.
Bien évidemment, il ne faut pas oublier l’indicateur 32, qui est transverse à tous et qui induit deux choses à vérifier :
“Il y a des spécificités sur le bilan de compétences, sur la VAE et l'apprentissage (puisqu'il y a eu une croissance très importante de la catégorie d'action par apprentissage). On a des difficultés liées aux obligations spécifiques des CFA, ce qui amène 1 audit sur 3 à des non-conformités majeures au regard des indicateurs 12 et 14.”
“Le dernier point à aborder concerne les multisites. Et là, il y a un enjeu majeur autour du respect de la définition du multisite au regard de la fonction centrale et du pilotage du système qualité. Quand il y a un multisite, il y a une autre manière d'auditer (même si l'enjeu principal est bien de vérifier qu'il y a un pilotage du système par la fonction centrale). En effet, on va aussi regarder comment ce système est déployé sur les sites. Dans le déploiement du système, on s’appuie sur le RNQ, sur Qualiopi. Il y a donc une vraie jonglerie à avoir et il faut être auditeur expert pour pouvoir mener ce type d'Audit.”
“On voit très vite les organismes qui se sont uniquement préparés à la dernière minute aux sacro-saints éléments de preuves qui vont entraîner la conformité. Pourquoi pas ? Ça, l'auditeur, il n'a pas à juger. Lui, il fait un constat et c'est pour ça qu'on se retrouve avec des audits de “petits niveaux” mais qui sont en conformité. De l’autre côté, on se retrouve avec des organismes qui ont pris en maturité, qui intègrent dorénavant dans leur mode de fonctionnement, dans leur mode de réflexion stratégique, organisationnelle, systémique, la démarche qualité et où ils transforment cette démarche qualité en système. C’est important que les organismes de formation prennent acte qu’ils sont à 3 ans de Qualiopi et que la démonstration de l'intégration de Qualiopi dans leur système est une valeur ajoutée à l'exercice de l'audit.
De plus, les enjeux ne sont pas les mêmes pour les différentes entités. Quand tu es une petite structure avec peu de salariés et très peu de moyens : là, Qualiopi est perçu comme une lourdeur. En effet, c’est une lourdeur. Ces prestataires se disent légitimement : “on me demande de la com, on me demande de la conception, de la réalisation, alors que moi, je suis tout seul, je suis formateur, tu te rends compte, tout ce qui est attendu, tu dois démontrer les moyens logistiques, ta montée en compétence, la veille, mais où je mets mon temps hormis dans le face-à-face pédagogique pour lequel je me suis engagé ?” Je comprends. C'est aussi pour ça qu'il y a des plateformes comme la vôtre qui existent. La vraie question, c’est : est-ce que l'investissement autour de moyens qui permettent de fluidifier, de venir en appui, de venir soulager n'est pas un choix stratégique aussi attendu ? (...) De toute façon, tu ne peux pas passer à côté de la transition numérique et de la transition digitale, c'est attendu, donc autant avoir une réflexion aussi là-dessus. On voit bien au regard des partenaires que vous avez qu’il y en a qui ont bien compris ça !”
“Je dis souvent : “dites ce que vous faites, faites ce que vous dites et uniquement après, vous démontrez”. L'erreur que font la plupart, c'est de miser seulement sur les éléments de preuve dans l’objectif de démontrer. Souvent, ça n’a ni queue ni tête : on ne sait pas d'où ça vient. Est-ce que ça vient d’une procédure ? d'un processus ? d'une organisation ? d'une décision ? Ils sont tellement convaincus que l'élément de preuve va être en conformité avec l'exigence que lorsque l’on constate, en tant qu’auditeur, que cela n’est pas le cas, ils tombent de haut.
S’il y a bien quelque chose que je dénote dernièrement pendant les audits de renouvellement, c'est que certains sont restés sur l'audit initial, c'est-à-dire qu’ils restent cantonnés à amener seulement l'élément de preuve. Or, à l’audit initial, il y a eu beaucoup de bienveillance parce qu’on lance Qualiopi. À l’audit de surveillance, on consolide l’exigence. Et maintenant, avec l’audit de renouvellement […], on attend un respect du référentiel d’un autre niveau. Si vous voyez Qualiopi comme une fin en soi en vous disant : “mince, c’est dans 2 mois. J’ai l’audit de renouvellement, il faut qu’on se réveille, vite vite vite” là, c’est “problématique”, ça sous-entend que vous n’avez pas fait le job […] dans votre projet d’entreprise d’intégrer Qualiopi comme quelque chose d’inhérent à l’amélioration continue. C’est ça la principale vérité : on est dans un audit de renouvellement, donc dans un audit qui logiquement, si vous avez fait le job, devrait être seulement une étape.”
“En tant qu’auditeur, on ne vient pas piéger les prestataires, on vient chercher la conformité. Ça, c'est vraiment le maître-mot des auditeurs de l’ISQ, c'est la recherche de la conformité. À travers le questionnement et la méthodologie d'investigation, on amène une valeur ajoutée au sein de l’ISQ, c'est-à-dire que les auditeurs viennent chercher la conformité, avec expertise et déontologie, logiquement le maintien de Qualiopi est induit dans les échanges. Nous sommes ni France compétences, ni la DREETS et ni les financeurs pour dire si vous êtes un bon organisme de formation ou un mauvais organisme de formation, ce n'est pas notre responsabilité. Notre responsabilité, c'est de dire : “regardez, vous êtes là, vous devez démontrer que vous respectez les exigences des indicateurs. Nous, on va vous amener dans une méthode de questionnement et de réflexion avec une certaine prise de hauteur qui va démontrer que vous êtes en conformité ou pas. Donc c'est aux organismes de formation de démontrer qu'ils ont déjà Qualiopi.”
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